UNE VOIE DE CANYONING OUVERTE À BRAS-MAZERIN PAR RIC-À-RIC
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( Documents Le Journal de l'Ile ) 24/09/2002 Un autre regard sur le Trou de Fer
VOIR : l'album photo de Domi ... Apprivoiser la falaise et les cours d’eau, tel
est le métier (et la passion) d’Eymeric Beaucheron, accessoirement responsable
de la société saint-gilloise spécialisée en canyoning, Ric-à-Ric. Dernier coup
d’éclat en date, l’ouverture d’une nouvelle voie d’accès au Trou de Fer via
Bras-Mazerin. Un itinéraire jusque-là presque vierge dont le surplomb, la
topographie et la longueur du second cassé (grande cascade) lui avaient forgé la
réputation de voie impraticable : 265 mètres de dénivelé, mais surtout comme le
souligne Eymeric Beaucheron, “l’impossibilité de coller à la paroi”, -si ce
n’est par le biais de “pendulaires” aléatoires et dangereux-, afin de fixer les
premiers points d’ancrage qui permettront par la suite aux canyonistes confirmés
d’emprunter cet itinéraire dans des conditions de confort plus
acceptables.
Avant l’expédition proprement dit, il aura fallu au responsable de longs jours de repérage en ULM ainsi que la préparation préalable du premier cassé de l’itinéraire, accusant une hauteur de 140 mètres. C’est pourquoi l’opération qui s’est déroulée les 9 et 10 septembre derniers a pu être réalisée en un temps record de deux jours. “Dans ce type d’entreprise, chacun des membres de l’équipée a un rôle bien défini”, explique le vice-président de la Maison de la montagne Dominique Durand, également de l’aventure aux côtés d’Eymeric Beaucheron, Christophe Sauvagnac et Roussel Tiroumalé. “La plus grande part de responsabilité et de risques revient au leader, en l’occurrence Eymeric, qui ouvre la voie, descend le premier perforeuse à la main afin de poser les points d’ancrage.” “Les autres membres s’occupent quant à eux du rapatriement du matériel, du déséquipement, des photos, ainsi que de la préparation du bivouac”, poursuit M. Durand. LES ORGANISMES ONT SOUFFERT Un tel périple effectué avec un équipement standard de 45 kilos par personne et dans un laps de temps très court ne peut qu’éprouver durement les organismes. D’autant que l’arrivée au pied du Trou de Fer n’a pas été synonyme de repos bien mérité pour les canyonistes. C’est sur le chemin du retour que le pourtant très physique et jeune responsable de l’association Canyon Péi, Roussel Tiroumalé, a bien failli craquer, totalement vidé par l’énergie considérable qu’il avait dépensée durant la première partie de l’aventure. Il voulait bivouaquer une journée avant de reprendre la route, mais en trois jours au lieu de deux, l’exploit n’aurait certainement pas été aussi retentissant : “Quand on a un coup de barre comme ça, qu’on s’est trop dépensé, c’est très dur, il faut avoir les ressources mentales pour avancer”, se souvient Dominique Durand. Cette nouvelle voie sur le Trou de Fer est complémentaire de l’itinéraire classique qui emprunte Bras-de-Caverne, “mais d’un niveau technique supérieur”, précise le responsable de la Maison de la montagne. L’accès par Bras-Mazarin offre une mire différente sur ce site exceptionnel doté d’une majestueuse beauté. “Cet itinéraire nécessite de nombreux rappels dans des encaissements très étroits, et d’un seul coup, on débouche sur ce point de vue magnifique sur le Trou de Fer et la surprise redouble l’émerveillement”, sourit Eymeric Beaucheron. Ce type d’opération -et sa médiatisation- vise en premier lieu à développer le canyon à La Réunion, une île dotée de conditions climatiques et topographiques idéales pour cette activité. Aujourd'hui, la vingtaine de professionnels du secteur assurent 15 000 sorties encadrées annuelles auxquelles viennent s’ajouter les pratiquants “sauvages”, se dispensant de toute structure pour s’adonner à leur passion. --------- Gestion des risques et activités de pleine nature La montagne est dangereuse. Elle est susceptible de tuer. À cela s’ajoute la question écologique exigeant une protection de la flore et de la faune réunionnaises. Les impératifs de sécurité et de préservation de l’environnement doivent-ils nous conduire à mettre sous cloche le patrimoine environnemental de l’île ? C’est en substance la question que se posent professionnels et amateurs de canyoning qui s’interrogent avec anxiété sur les modalités administratives du futur Parc national. Eymeric Beaucheron craint notamment que pleuvent les interdictions. “Ce sont des activités douces qui n’altèrent pas l’environnement”, plaide le responsable de Ric-à-Ric. Et Dominique Durand de renchérir sur une certaine culture du risque zéro pratiquée par les services de l’État : “À Bras-Rouge, l’interdiction n’est toujours pas levée. Une victime d’un éboulement, c’est toujours malheureux, mais ce sont des phénomènes qui peuvent survenir n’importe quand. Faut-il pour autant interdire la route de Cilaos ?”, conclut le responsable. Loïc Ton-That |